Ça y est ! Le député d’Agboville commune, M. Adama Bictogo, ci-devant Secrétaire Général Exécutif du Rhdp, vient de se hisser sur le perchoir de l’Assemblée nationale, en sa qualité de président de cette chambre de notre parlement.
Avec ou sans le soutien de l’opposition, Adama Bictogo était assuré d’être le président de l’Assemblée nationale
Cela n’est vraiment pas une surprise. Le Rhdp, son parti, dispose d’une majorité absolue à l’Assemblée nationale, et comme le vote mécanique et impératif est une marque déposée dans notre pays, personne ne peut se faire l’illusion de le battre à cette élection. De plus, ayant eu l’onction du chef de l’Etat, inspirateur, mentor et référent du Rhdp, il ne pouvait en être autrement. En revanche, ce qui est une surprise, c’est l’unanimité faite autour de sa candidature.
Le Pdci-Rda, le Ppa-Ci, l’Udpci et le Fpi, les seuls partis politiques présents à l’Assemblée nationale, en dehors du Rhdp, ont surpris plus d’un, en apportant leur soutien à M. Bictogo, laissant au bord de la route, la candidature issue du Pdci-Rda, celle du député Jean-Michel Amankou. – Quelles sont les motivations profondes de ce soutien inattendu ? – Quelles en sont les retombées ? – Quelles en sont les attentes ? – Est-ce un nouveau départ pour la classe politique ivoirienne ?
Difficile de répondre pour l’instant à ces interrogations qui mettent de nombreux militants de l’opposition dans une dissonance …cognitive ! En tout état de cause, ne dit-on pas que la politique est la saine appréciation de la réalité du moment ? Cette réalité du moment, c’est qu’avec ou sans le soutien de l’opposition, M. Bictogo était assuré d’être le président de l’Assemblée nationale. C’est donc une bataille perdue d’avance, si tant est que l’opposition aurait voulu la mener.
L’opposition a fait sa part pour un nouveau départ de la classe politique ivoirienne
Mais cela n’empêche pas les militants de l’opposition de se poser des questions sur la nouvelle posture de ceux qui sont chargés de parler en leur nom. Les partis d’opposition ont-ils voulu saisir l’opportunité d’une situation, qui de toutes les façons ne leur est pas favorable, pour montrer patte blanche, et surtout faire savoir qu’ils sont dans de bonnes dispositions pour la réconciliation et la paix, et donner la chance à un nouveau départ? Est-ce un message à l’endroit de la « communauté internationale » pour montrer sa bonne foi?
Ou est-ce un message subliminal au chef de l’Etat et au Rhdp à l’effet de lâcher du lest, et de créer éventuellement des conditions équitables et consensuelles pour les joutes électorales à venir ? Ainsi, au rendez-vous du donner et du recevoir, l’opposition a fait sa part pour un nouveau départ de la classe politique ivoirienne, et attendra certainement qu’en retour, le parti au pouvoir lui renvoie la balle. Mais peut-on véritablement croire, que cet acte de l’opposition quelque symbolique qu’il soit, aura une quelconque portée, au point de pousser le Rhdp à renvoyer l’ascenseur ? Rien n’est moins sûr !
S’il est trop tôt pour juger objectivement la nouvelle posture de l’opposition (qui ne veut certainement pas de belligérance), parce que ne maîtrisant pas les tenants et les aboutissants, encore moins les attentes de l’appel, il est tout de même bon de signaler qu’avec le Rdr, devenu Rhdp, il ne faut pas s’attendre à une quelconque reconnaissance ou un effet retour favorable.
Avec le Rdr devenu Rhdp, il ne faut pas s’attendre à une quelconque reconnaissance ou un effet retour favorable…
On a en mémoire que le Pdci-Rda, le plus vieux parti de notre pays, s’était donné corps et âme pour que le pouvoir d’Etat revienne en 2010 au Rdr son allié dans la coalition du Rhdp. Il a fait tous les sacrifices et les concessions possibles, à la limite de la compromission, comme renoncer à un recours qui aurait pu permettre à son candidat d’être au deuxième tour de l’élection présidentielle de 2010.
Assuré qu’il était qu’après 2010, et l’appel de Daoukro de 2015 qui a permis au chef de l’Etat actuel d’aller en roue libre à l’élection présidentielle de cette année-là, 2020 serait à lui, comme un retour d’ascenseur que lui ferait le Rdr pour tout ce qu’il a fait. A l’approche de l’échéance de 2020, il fut répondu au Pdci-Rda, qu’aucune promesse ne lui a été faite, encore moins un engagement pris avec lui pour permettre à son président, M. Henri Konan Bédié, de goûter à nouveau aux délices que procure la conduite de la locomotive du train ivoire.
Qui plus est, l’alternance dont rêvait le Pdci-Rda, n’était pas un programme politique. La suite, on la connait et on doit pouvoir en tirer des leçons. C’est pourquoi, nos parents dans leur infinie sagesse, nous enseignent que : « lorsque tu as été mordu par un serpent, la vue d’un ver de terre te fait sauter » ! Tout un programme. Alors vigilance et attendons de voir. Mais s’il y a eu un matin en Eburnie, il y aura assurément un soir et l’ivraie sera séparée du vrai.