« Le succès de ce pays, repose sur l’agriculture »! Un puissant phrasée qui a bercé les enfants des années 1980 en Côte d’Ivoire. Il était du premier président de la république, qui avait une haute idée de la clé de succès de son pays. La formation et l’agriculture étaient un sacerdoce pour lui. Un pays foncièrement agricole ne pouvait compter sur le pétrole qu’il ne sait pas transformer pour se développer.
L’agriculture était donc le chemin à emprunter, et la formation de la jeunesse la porte de la prospérité. Mais après sa disparition en 1993, le succès de la Côte d’Ivoire repose désormais sur l’incertitude des chiffres et d’agrégats virtuels, loin des réalités agricoles et des populations visiblement désabusées. Entre espérance refoulée et promesses politiques, les nuages de l’incertitude squattent les horizons d’une émergence virtuelle. Qu’attendre d’une alliance entre Laurent Gbagbo et Konan Bédié?
Génération sacrifiée sur l’autel d’intérêts privés
Le multipartisme des années 1990 a apporté la démocratie, la liberté d’expression et de conscience politique. Mais la démocratie a des règles que tout homme aspirant à diriger un peuple doit pouvoir appliquer. Pour favoriser la pleine expression des libertés publiques, il faut l’éducation, la santé et la sécurité équitablement pour tous. Pourtant, ceux qui à cette époque étaient dans l’opposition et qui ont été les pionniers du multipartisme ont tous gouverné le pays, sans que la moindre avancée ait été enregistrée sur ces trois aspects.
Entre 1993 et 1995, lorsque la crise de l’éducation nationale se pose, la réforme du ministre Pierre Kipré se heurte aux exigences de la banque mondiale et du FMI. Jusque-là financée par un fonds de la coopération française, la Côte d’Ivoire devait faire un choix pour l’éducation et la formation de sa jeunesse. Faire financer la reforme de l’éducation nationale par des investisseurs privés qui entendent rentabiliser l’opération par un taux d’intérêt. Où laisser sombrer un système qui portait déjà les impacts de la mutation politique et social qui avait cours dans le pays.
On était déjà à plus de 150 000 étudiants à l’université de Cocody prévue pour accueillir 50 000 étudiants. Bouaké et Abobo Adjamé n’ayant pu absorber les effectifs qui s’accroissaient chaque année. Le gouvernement de Henri Konan Bédié a fait un choix, et les grandes écoles privées, accessibles aux enfants des héritiers de l’administration Houphouët et des bourgeois ont vu le jour. Les frais d’écolage étaient insupportables pour les paysans dont les cultures de rente peinaient à trouver des acheteurs.
Le droit à l’éducation devenait ainsi un business qui va plus tard accroître les inégalités dans le pays. Les écoles et universités publiques bénéficiaient d’un régime spécial et d’un enseignement au rabais. Entre crise économique et lutte politique, il fallait suivre les directives des institutions de breton woods. Entre-temps, des générations entières ont été privées de leur droit au savoir. Pas de nouvelles universités publiques, ni de politique agricole aboutie.
À la refondation comme à la récréation avec Laurent Gbagbo
La construction de l’Allemagne aurait dû inspirer l’historien président Laurent Gbagbo. Après la chute du mur de Berlin en 1989, les deux Allemagnes ont fait le bilan de l’actif et du passif des deux blocs. Cela a permis de prendre des mesures pour relancer le nouveau pays sur des bases saines. Pourtant, à l’avènement de l’administration de Laurent Gbagbo, le FPI a voulu refonder sur les ruines d’un système dont tous les leviers étaient tenus par la France.
40 ans de politique ivoirienne, dont l’essentiel des racines s’abreuvaient à l’Élysée, ne se remplace pas à coup de slogan politique. La refondation des hommes aguerris à la critique et à l’opposition politique étaient désormais lancée. La bande de professeurs, était prête à transformer le pays, mais avec qui ? Les mêmes jeunes formés au rabais dans nos universités surpeuplées, se sont faits hommes.
Vu que la république s’en était lavée les mains, la FESCI en avait pris la charge. L’environnement syndical instauré par la Fédération Estudiantine et Scolaire de Côte d’Ivoire sur les campus, avait donné à la nation des « étudiants guérilleros ». Les membres de la FESCI étaient l’autorité sur les campus et leurs soutiens politiques avaient désormais le pouvoir. Le fer de lance de la politique de l’opposition était face à son destin; accompagner l’homme politique qui les a couvés.
Le FPI et d’autres partis politiques en ont finalement fait des militants. À la sortie brutale du gouvernement de la refondation, le bilan est le même. Pas de nouvelles universités construites, ni une implication dans le développement agricole du pays.
Contrairement à Laurent Gbagbo et Henri Konan Bédié, Houphouët y croyait
Jusqu’en 1981, les investissements dans le secteur agricole qui représentaient 24,4 % du budget global de l’État sont tombés à 13%. Le président Houphouët Boigny en avait fait une priorité nationale au point d’y consacrer le ¼ du budget, même s’il y’a eu une baisse drastique. Si Le PDCI RDA et le FPI (socialiste) voulaient vraiment faire comme le vieux BÉLIER, cette proportion du budget consacrée à l’investissement dans le développement du secteur, à défaut d’augmenter, devrait être maintenue.
Alors que Laurent Gbagbo appelait à la souveraineté nationale, le budget consacré au développement du premier secteur de l’économie ivoirienne continuait de baisser. Après le début de l’apogée du bref miracle ivoirien en 1984, la proportion des investissements dans le secteur est passée de 13 % à 9,7 % sur la période 2002-2007. « On assiste à une sorte de déconnexion entre politiques agricoles, agence d’offres de services agricoles et les unités familiales d’exploitation agricole » selon le ministère de l’Économie, dirigée à l’époque par feu Antoine BOHOUN BOUABRE, dans une étude rendue publique en 2010.
Mais plus grave, alors que la proportion du budget à l’investissement baissait, le budget de fonctionnement des structures de gestion de la filière explose. Les ratios dépenses agricoles de fonctionnement sur dépenses agricoles et dépenses agricoles d’investissement sur dépenses agricoles évoluent en sens contraire. Le premier cité connaît son niveau le plus bas en 1999, avec un taux de 41 %, et son niveau le plus élevé en 2006, avec un taux de 82,3 %.
Quant au second ratio, son niveau le plus bas s’est établi à 17,7 % en 2006 et son niveau le plus élevé s’est situé à 59 % en 1999. L’État a payé cher des fonctionnaires, plutôt que d’investir chèrement dans le secteur agricole pour développer son potentiel de production. C’est un ensemble de choix difficilement compréhensible quand on sait que le pays est une économie agricole.