Au Bénin, le spectre d’une nouvelle révision constitutionnelle plane depuis quelques jours. Patrice Talon et son régime sont fortement soupçonnés de vouloir procéder à une nouvelle relecture de la loi fondamentale du pays. Le débat occupe l’actualité et les commentaires vont dans tous les sens. La polémique a été suscitée par une rencontre des Présidents d’Institution au cours de laquelle le Président de l’Assemblée a lâché une bourde en parlant d’une « assemblée constituante ».
Bénin : vers une nouvelle révision constitutionnelle ?
A deux ans de la tenue des élections générales, l’idée d’une nouvelle révision constitutionnelle est très agitée. On apprend que la loi fondamentale pourrait être encore toilettée après la révision opérée nuitamment en 2019 par la 8è législature qui était uniquement composée de députés acquis à la cause du régime en place.
Pour le moment, aucun indice officiel ne précise la révision constitutionnelle. D’ailleurs, dans le camp de la mouvance, des voix officielles apportent un démenti. Selon le Borgia Santos Tawes N’Bouke, membre de la commission des lois du parlement, aucun projet de révision constitutionnelle n’existe à date.
L’opposition n’a pas attendu des signes officiels pour réagir. Dans une sortie médiatique, le Parti Les Démocrates a exprimé son opposition à ce supposé projet de révision de la Constitution qui pourrait ouvrir la porte à un troisième mandat. « C’est un Non catégorique à la révision opportuniste de notre Constitution qui ouvrirait la voie à un troisième mandat », a déclaré le Porte-parole du Parti.
La Force cauris pour un Bénin Emergent (FCBE) a aussi donné de la voix. « Le parti FCBE réaffirme avec véhémence son opposition à toute révision opportuniste et non consensuelle de la constitution », a-t-elle indiqué.
Quand la Cour conforte la rumeur…
Pendant que les désaccords se multiplient sur l’éventuel projet de révision, la Cour constitutionnelle rend une décision qui conforte la rumeur. En effet, suite à la requête d’un citoyen qui soulève des difficultés dans l’application de la disposition sur le parrainage, les sept sages ont invité l’Assemblée nationale à modifier le Code électoral en vue des élections générales de 2023. Selon la décision, cette modification vise, d’une part, à « rétablir l’égalité du pouvoir de parrainer à l’égard de tous les maires et, d’autre part, rendre conformes à l’article 49 de la Constitution, les dispositions de l’article 142, alinéa 6 de la loi n°2019-43 du 15 novembre 2019 portant code électoral ».
Il est vrai que dans sa décision, la Cour constitutionnelle n’a pas évoqué une révision de la constitutionnelle, mais selon certains observateurs, la modification du code électoral pourrait le prétexte pour toucher une nouvelle fois la Constitution. Tout ceci conforte la position de certains acteurs politiques qui avaient dénoncé des incohérences dans la nouvelle Constitution adoptée en 2019.
Le système de parrainage avait notamment suscité des inquiétudes chez Nourou-Dine Saka Saley. Visiblement le temps lui donne raison. « La décision de la Cour constitutionnelle qui a autorisé les députés de la 9è législature non encore installés à rendre leur démission est la source même du chaos et de la cacophonie qui va régner lors de la question du parrainage en 2026. Cette formalité sera un chaos sans nom parce que nous ne saurons pas des maires ou des députés entrants ou sortants, qui sont ceux qui auront la qualité de donner le parrainage », avait-il alerté.
A défaut d’une révision de la Constitution qui va enlever le parrainage ou d’une relecture du Code électoral qui va réaménager les dates des différents scrutins ou à défaut d’un revirement de jurisprudence, nous ne saurons pas les personnes habilitées à donner le parrainage », avait-il alerté.
Nourou-Dine Saka Saley
Une révision constitutionnelle inévitable ?
Selon les analyses, si le Code électoral ne peut pas à lui seul résoudre les problèmes soulevés, la révision constitutionnelle pourrait être l’ultime option. Mieux, il faut noter que le Code électoral et la Constitutionnelle ont des dispositions communes. La modification de l’un pourrait donc logiquement entrainer la révision de l’autre.
Selon certaines indiscrétions, la révision constitutionnelle est une option sérieuse qui est mise sur la table. Le Président de l’Assemblée nationale avait même déjà annoncé les couleurs le jour de son investiture. « Dans un esprit de concertation, nous pourrions courageusement envisager de porter à la Constitution les retouches qui s’imposent, en vue de son amélioration constante, tout en conservant les fondamentaux, notamment l’option républicaine et démocratique et la limitation à deux du nombre de mandats du président de la République », avait déclaré Louis Vlavonou.