Le chassé-croisé entre le Mali et la France est loin de s’estomper. Après les échanges « d’amabilités » entre Emmanuel Macron, Yves le Drian, Florence Parly d’une part, et Choguel Maiga et Abdoulaye Diop d’autre part, l’heure est maintenant aux accusations et aux dénégations sur des massacres qui auraient été commis à Moura par l ‘armée malienne et du charnier découvert à Gossi qui serait l’œuvre de l’armée française.
Le chassé-croisé entre le Mali et la France est loin de s’estomper
En effet, du 23 au 31 mars 2022, l’armée malienne a mené une opération dans la ville de Moura, antre des terroristes, dans le cadre de sa lutte contre les djihadistes et les bandes armées dont la plupart est affiliée à Al-Qaïda. L’état-major de l’armée malienne, a dans un communiqué, annoncé l’élimination de 203 terroristes et fait 51 autres, prisonniers.
Après la prise de la ville, un ratissage a eu lieu pour débusquer les terroristes fondus dans la population. Pour l’armée malienne, cette opération fut une grande réussite et se poursuivra à l’effet de permettre au Mali de recouvrer l’entièreté de son territoire. Peu de temps après cette opération, l’Ong Human Rights Watch conteste la version des autorités maliennes, et décrit plutôt « le pire épisode d’atrocités » commises contre des civils au Mali depuis dix ans.
L’Ong fait état de 300 civils exécutés sommairement par les soldats maliens, de pillages et de viols. La population ciblée, seraient celle des Peuhls. Malgré les dénégations des autorités maliennes, la France et ses alliés surtout les Etats-Unis, se sont fait l’écho de ces allégations. Sans perdre du temps, la France est (comme d’habitude), est à l’initiative d’une résolution au Conseil de sécurité de l’Onu, à l’effet d’avoir « des enquêtes indépendantes » sur ce présumé massacre.
La Russie soutenue par la Chine, s’y est opposée. La presse française a elle aussi abondamment relayé l’information, et mis en exergue la présence des « instructeurs russes » pour certains et des « mercenaires russes » pour d’autres. Un parallèle est vite fait entre Moura et Boutcha en Ukraine.
La France, frustrée de ne plus pouvoir en imposer au Mali
Certains y ont même vu, « la méthode russe » qui serait « une culture systémique de crimes de guerre, comme méthode de guerre normale » (Alex Clarkson, professeur au King’s College, London). Mais pour les autorités maliennes, la France, frustrée de ne plus pouvoir en imposer au Mali, s’évertue à décrédibiliser le gouvernement malien pour le mettre au banc des accusés.
On en était encore à ces échanges « d’amabilités », lorsque l’armée malienne affirme avoir découvert un charnier près de la base militaire que venait de lui rétrocéder l’armée française, à Gossi dans le nord du pays. Ce charnier a été découvert par une patrouille envoyée en reconnaissance dans les environs de la base. Alors que ni l’armée malienne, encore moins le gouvernement du colonel Goïta n’avait pas encore formellement accusé la France, l’armée française a par anticipation, fait diffuser une vidéo.
On y aperçoit des hommes en tenues militaires, entourant un charnier et d’autres creusant, pour ensevelir des corps. En visionnant la vidéo, il est extrêmement difficile, comme le reconnaissent certains journalistes, de distinguer la couleur de peau des hommes, leurs tenues militaires et leurs écussons.
Mais d’autres journalistes et autres spécialistes qui écument les plateaux des chaînes françaises, ont réussi l’exploit de reconnaître des hommes de type caucasien, et partant de reconnaître « les mercenaires russes ».
Du Mali et de la France, qui a fait quoi ? Et qui dit vrai ?
Sans porter un jugement sur cette vidéo et son contenu, on ne peut s’empêcher de trouver suspectes, l’anticipation dont a fait preuve l’armée française, et l’unanimité de la presse à soutenir sans recul, la version de l’armée française en portant un doigt accusateur vers les russes.
Pourquoi, cette presse qui s’est évertuée à déconstruire, séquence par séquence, la vidéo russe sur les événements survenus à Boutcha, n’a pas usé de la même grille d’analyse ? Pourquoi la France n’est pas à l’initiative d’uné résolution au Conseil de sécurité de l’Onu pour « des enquêtes indépendantes » ?
Mais cela se comprend, nul ne montre son village avec la main gauche. Une interrogation demeure toutefois et taraude l’esprit de nombre de personnes : «Or donc », l’armée française dispose de moyens technologiques pour voir des hommes de type caucasien depuis le ciel fabriquer un charnier pour l’accuser, mais n’a jamais vu les colonnes de motos et pick-up des terroristes qui ont tant endeuillé les familles maliennes ?
En tout état de cause, information ou intoxication sur Moura et Gossi, rien ne peut être affirmé dans l’absolu. Du Mali et de la France, qui a fait quoi ? Et qui dit vrai ? Demain nous situera. Demain est certes un autre jour, mais demain arrive toujours. Et s’il y a eu un soir au Mali, il y aura assurément un matin et l’ivraie sera séparée du vrai.