Proche de Laurent Gbagbo, Steve Beko, à l’état civil, Lago Fabrice, cadre de l’ Union des nouvelles générations (UNG), fait des confidences sur les raisons véritables qui ont conduit à la rupture entre l’ex-président et Pascal Affi N’guessan, son ancien Premier ministre, dans la bataille pour le contrôle du FPI. Dans la contribution ci-dessous, le responsable de la Communication du parti de Stéphane Kipré (gendre de Gbagbo), revient sur les conditions de la rencontre de Bruxelles Affi-Gbagbo et la proposition de sortie de crise faite par le président du FPI à son ancien patron Laurent Gbagbo.
Steve Beko: « Gbagbo n’a pas refusé de discuter avec Affi mais… »
Cette deuxième partie de mon analyse s’attèlera à analyser les conditions de la rencontre et la proposition de Pascal Affi N’guessan. J’utilise très à propos le terme « quiproquo » car il me semble que c’est lui qui est approprié pour décrire la situation. Selon Laurent Gbagbo, Koné Katinan l’a appelé pour lui dire que Pascal Affi N’guessan était décidé à lui remettre le FPI. Il lui demandera par conséquent de venir le voir sans intermédiaire et lui indiquera même l’hôtel où loger. Il le recevra par la suite avec seulement Me Habiba afin de le préserver. Quant à Pascal Affi N’guessan, il partait pour négocier. Dès lors que les deux ne concevaient pas la rencontre sous le même angle, il était acquis qu’elle se solderait par un échec.
Historique de la crise
Plusieurs camarades ont retracé avec brio l’historique de la crise au FPI. Je vous conseille de lire le doyen Ambroise Gnahoua à ce propos. Quant à moi je veux juste vous servir un résumé. Après sa sortie de prison, Miaka Oureto passe la présidence du parti à Pascal Affi N’guessan qui organise une tournée populaire. Partout, il est accueilli en triomphe par les militants et démocrates ivoiriens. En juillet 2014, Affi N’guessan procède à un réaménagement du secrétariat général du FPI qui crée des mécontents dont Simone Gbagbo. Laurent Akoun, Douaty Alphonse et Tapé Kipré s’opposent au fond et à la forme.
Selon eux, même si Affi en qualité de président du parti a le droit de faire des réaménagements, cela devait se faire après consultation, car son maintient à la tête du parti résulte d’un compromis politique dès lors qu’élu en 2001, son mandat est arrivé à son terme sans qu’aucun congrès se tienne. Le 11 juillet 2014, Par l’intermédiaire de son Directeur de cabinet, Niagne Akpa, Simone Gbagbo donne sa démission de cette direction. Il faut dire qu’une crise couvait déjà, car auparavant Pascal Affi N’guessan avait nommé Alain Dogou au sein de la CEI sans consulter les organes du parti. Malgré la colère de ses camarades, il confirmera cette nomination en aout 2014. Face à la montée de la fronde, il convoque un comité central le 13 septembre 2014 pour débattre spécialement de la CEI.
Au cours de cette réunion, il soumet la question de la présence ou non de Dogou à la CEI au vote. Les résultats sont éloquents : 119 personnes se prononcent en faveur de son maintien à la CEI, 02 s’abstiennent et 138 votent pour la sortie du FPI et donc de Dogou de la CEI. Alors que les militants s’attendent que à ce que Dogou donne sa démission de la CEI, Affi usera de ruse en affirmant que désormais, Dogou représente la coalition AFD qu’il préside et non le FPI. Quand ses camarades lui demandent de sortir le FPI de AFD, il refuse. Drôle de démocrate !
En février 2015, Affi procède à un autre réaménagement du secrétariat général et cette fois-ci, il frappe très fort. Dans la liste, rendue publique le samedi 28 février 2015 on note aisément que l’ancien Premier ministre de Laurent Gbagbo a enlevé Sangaré Abou Drahamane et Simone Ehivet Gbagbo, respectivement aux postes de 1er vice-président chargé de la stratégie et de la politique générale du parti et de 2e vice-présidente chargée de la vie du parti. Au poste de 1er vice-président, Affi N’Guessan a mis son Directeur de campagne, Marcel Gossio. Je vous épargne les détails sur la mise en place d’un comité de médiation et les conclusions rejetées par Affi et la suite avec des camarades qui demandent à Gbagbo d’être candidat au congrès dont la date est fixée de façon collégiale par la médiation dirigée par le gouverneur Dakoury Tabley.
Que cède Pascal Affi N’guessan ?
Il est acquis qu’une négociation est un rapport de force. C’est donc celui qui est fort qui impose ses conditions. Au moment de la rencontre entre Pascal Affi N’guessan et Laurent Gbagbo, qui est en position de force ? La majorité des militants du FPI se reconnait en Gbagbo qui vient de remporter avec brio son procès à la CPI. Quant à Affi, il est évident qu’il représente une minorité. La seule chose qu’il détient, c’est la présidence du FPI qui lui est reconnue par la loi ivoirienne. Voici ce qu’il peut mettre dans la balance et c’est ce qu’il fait en proposant à Gbagbo un rôle de reine d’Angleterre.
Quand il propose à Gbagbo d’être président du FPI et lui vice-président avec plein pouvoir, assurant l’intérim, il est évident que Gbagbo ne pouvait jamais accepter cette proposition. Affi en sortirait largement vainqueur puisque tous les autres camarades seraient dans l’obligation de retourner sous sa gouvernance. Ils seraient aussi contraints de le soutenir à la présidentielle. Au nom de la légalité qu’il détient, il s’imposerait ainsi à la légitimité. Accepter un tel deal serait pour Gbagbo un mauvais signal pour ceux qui l’ont soutenu toutes ces années et ont enduré des années de prison, conséquence de la guerre au sein du FPI.
En fait, si un tel deal était validé, Affi perdait juste le nom de président du FPI mais il le demeurait dans les faits. C’est dire qu’il n’aurait rien cédé. C’était bien essayé, mais ce n’est pas à Gbagbo qu’on fait avaler un tel deal. Dès lors, Gbagbo s’est convaincu que les négociations avaient échoué et qu’il fallait accepter d’aller à la rupture. C’est pourquoi je m’étonne que des gens disent que Gbagbo a refusé de recevoir Affi. Il l’a reçu deux fois à Bruxelles, puis il y a eu des négociations en Côte d’Ivoire entre les deux groupes. Les négociations ont simplement échoué. Gbagbo n’a pas refusé de discuter. Simplement qu’a un moment des discussions, il faut faire le constat de notre désaccord et nous économiser du temps. Bonne chance au président du FPI Pascal Affi N’guessan ! J’ai des amis avec lui et je leur souhaite le meilleur.
Steve Beko.