Cautus esto mater salutis (La prudence est mère de sûreté), disent les Latins. Le feuilleton de l’incarcération des 49 militaires ivoiriens au Mali, début juillet 2022, plus précisément le 10 de ce mois, a pris fin. Le suspense avec. Le Colonel Abdoulaye Maïga, sur le plateau de la télévision malienne, a délivré un message, le 43e communiqué du Gouvernement de la Transition : « Par décret n° 2023-0002/PT-RM du 06 janvier 2023, SE le Colonel Assimi GOÏTA, Président de la Transition, Chef de l’Etat a accordé sa grâce avec remise totale de peines aux 49 Ivoiriens condamnés par la justice malienne (…) ». Un beau cadeau de Noël et de nouvel an. L’on ne pouvait espérer mieux ! Deo Gratias ! Mais, que de péripéties avant d’en arriver là ? Que de rebondissements ? Que de présupposés, de rabat joies ? Que de ‘’Cassandre’’ qui eussent souhaité, que cela tournât au vinaigre entre nos deux pays ? Et que, ce faisant, le Gouvernement Ivoirien soit en difficulté ?
Affaire des 49 soldats ivoiriens au Mali (Acte 1): ENFIN LIBRES, MAIS !!! (Par Bamba Alex Souleymane)
Le réquisitoire d’une extrême sévérité des juges maliens, lors du procès expéditif du 29 Décembre 2022, avait jeté l’émoi en Côte d’Ivoire. L’opinion en avait été, pour le moins, sonnée. Tant, le verdict était apparu par trop sévère. En somme, une condamnation aux relents de règlements de comptes. En l’espèce, la condamnation à la peine de mort requise contre les trois dames militaires, libérées le 03 septembre 2022, pour raisons humanitaires, était apparue, plutôt, ‘’ubuesque’’ voire contre nature ! Le fondement juridique était problématique et pour le moins discutable. Mais, en politique… l’art de faire une chose et en pensant à son contraire existe. A preuve, la médiation et les efforts diplomatiques, n’ont pas été, un ‘’long fleuve tranquille’’. L’on se remémore, des pics et incorrections tels que l’intervention du Premier ministre malien par intérim, le Colonel Abdoulaye Maïga à la tribune de l’ONU le 24 septembre 2022. Ma réaction face à cette prise de parole du frère du Mali, bien que j’en fusse choqué, n’a pas moins été, une invite à la tempérance, à la mesure, à la retenue, et ce pour tenir compte, des liens ‘’multiséculaires’’ et à la fraternité qui unissent nos deux pays depuis les temps immémoriaux :
« La Côte d’Ivoire et le Mali sont naturellement liés par l’histoire. C’est une relation multiséculaire, multiethnique et ethnosociologique. D’où la prudence observée. Le discours du Premier ministre par intérim, apparut-il, en ce temps-là, comme peu diplomatique et peu responsable. Il aurait fallu un minimum de courtoisie et éviter de ternir une si longue tradition d’amitié et de fraternité entre les deux pays. A un tel niveau de responsabilité et à une si haute tribune, l’on doit faire montre de plus de retenue et de diplomatie. Sa prise de parole et été du plus mauvais effet. Un responsable ne parle pas à tout va. Cela a été un acte manqué Ses comparaisons étaient vraiment déplacées car visant à tourner en dérision le Président ivoirien. L’on demeure surpris que la junte malienne ait pu croire un seul instant (et soutienne mordicus) que les autorités ivoiriennes aient pu penser à s’attaquer à la souveraineté du Mali. C’est ridicule. Il suffit d’en venir à l’évidence que nos pays sont quasiment interdépendants à plusieurs niveaux, la mauvaise santé d’un des pays de l’hinterland à des répercussions sur les autres immanquablement. », avais-je écrit.
La crise avait atteint le seuil du paroxysme. L’attitude du Président Alassane Ouattara, qui a privilégié le dialogue et la diplomatie ; a rassuré les Ivoiriens dans l’optique d’une sortie heureuse, de cette crise avec la libération de nos soldats. L’histoire vient de lui donner raison une nouvelle fois. Mes mots sont inscrits, gravés, dans le marbre de la vérité qu’il me plaît ici de réitérer.
LA SAGESSE DE OUATTARA QUI A ÉVITÉ LE PIRE !…
Les Latins sont formels : ‘’le sage ne fait ou ne dit rien, qu’il ne maîtrise ; qu’il ne sache’’… Savoir se taire est une grande qualité. Une vertu. Plus encore, savoir se taire, alors que l’on sait tout ou presque, relève d’être équilibré et avoir fait son unité intérieure et extérieure. Cela confère une force intérieure qui vous différencie des autres. C’est cette valeur qui caractérise le chef de l’Etat de Côte d’Ivoire. Savoir garder le silence devant les cris d’orfraie, les incantations et autres gesticulations de ceux qui savent moins, est une qualité supérieure dont, le commun des mortels ; n’est pas forcément doté face aux épreuves. Face au cas de force majeure. Devant l’obstacle imprévisible. Aussi les gesticulations et propos à l’emporte-pièce sur l’affaire des 49 soldats ivoiriens au Mali, se révèlent être pour le moins ; dérisoires voire précipités. Une attitude à l’antipode de la réalité. Le silence observé par le Président Ouattara, avait sonné à la fois, comme de la réserve et en même temps, de la maîtrise de soi. C’est-à-dire : avoir de la retenue là où (si ce n’est à cause de l’intérêt supérieur des pays frères concernés), il aurait suffi que l’on donnât de la voix, que l’on déclamât ou se laissât emporter par la clameur et le chœur des lamantins. Que non !
Lorsqu’on a des responsabilités d’Etat, on ne se laisse pas emporter par les réactions hérétiques ou épidermiques. Même si, elles sont, ou seraient au demeurant, de bon aloi. La sagesse et la prudence doivent toujours commander les émotions. Aussi est-il regrettable que des comportements ‘’insufficients’’ n’en aient saisi l’importance de l’enjeu et n’en aient été habités par la sagesse. En l’occurrence, l’affaire des 49 soldats au Mali en a été une illustration grandeur nature. Dans « l’incompréhension » qui a opposé notre pays au Mali, l’opinion ivoirienne avait donné de la voix. Une attitude a priori normale ! Certes, mais pour autant ; on ne pouvait se laisser aller à la polémique, aux affirmations péremptoires et autres préjugés. Parce que, dès lors qu’il s’agit de l’armée, cela devient quasi automatiquement, une question d’Etat. Cela induit, l’extrême prudence, la circonspection voire la mesure dans les prises de positions. Et pour l’occasion, l’on ne peut qu’être admiratif du Président Alassane Ouattara. Bien qu’il sût tout, en fils digne, ayant beaucoup reçu, appris et retenu du Président Houphouët, il use avec habileté et dans le langage et dans le comportement. Tout sauf la posture des Cassandre.
Ecce Homo : voici l’homme Ouattara, oint dans son magister par le père fondateur Houphouët
En homme d’Etat, il a gardé le silence et observé une démarche prudentielle. Et pourtant, il en savait suffisamment. Au surplus, il entendait tous les murmures de ses concitoyens. Mais, lui, a privilégié la démarche sacramentelle de la négociation que, depuis la nuit des temps, nos anciens s’autorisaient dans la résolution de tous conflits ou incompréhensions voire turpitudes, dans la marche de nos sociétés traditionnelles immémoriales. En l’espèce, le Président s’est comporté en grand Seigneur. En homme doté de sagesse. Car, savoir tout, entendre tout ou presque, mais rester digne ; n’est pas donné à tout le monde. Au reste, combien de chefs ; ici ou là, n’ont-ils échoué ; parce qu’ils n’ont su faire le bon choix entre se taire ou parler ? N’ont-ils su faire montre d’un stoïcisme autocentré même face à des situations de quadrature du cercle ? C’est-à-dire devant des situations cocasses, délicates et très sensibles. En l’occurrence il s’agissait moins de s’agiter, de disserter sur une question pour le moins délicate et sur laquelle le verbe se fait parcimonieux.
En l’espèce et pour le coup, Ouattara a fait la leçon. La leçon de sagesse ! En savoir beaucoup, mais travailler à la résolution du problème posé. User avec tact et discrétion à résoudre l’équation au calme ! Loin des clameurs des néo politico-influenceurs de pacotille. Au reste, faut-il s’en étonner ? C’est un secret de polichinelle d’affirmer que ; son modèle achevé, est et reste, le président Félix Houphouët Boigny, le mentor, le sage qui lui a communiqué les vertus ineffables de la sagesse, du don de soi, de l’amour incommensurable pour sa patrie. Ecce Homo : voici l’homme Ouattara, oint dans son magister par le père fondateur Houphouët qui était au crépuscule de sa vie. On comprend donc… Ouattara a puisé dans les enseignements légués par Houphouët pour y faire ses classes. Il en est fier et ne s’en est jamais caché puisque, cette initiation s’est faite à ciel ouvert ; devant la nation entière, alors qu’il était encore le premier (et unique) 1er ministre du Sage de Yamoussoukro.
UN GRAND CHEF !
Pour tout dire, Alassane Ouattara est un chef ! Dans la pure tradition ancestrale. Lui, mieux et plus que quiconque, sait : « qu’un chef, ne parle pas pour parler ». Le chef ne doit pas prononcer un mot de plus qu’un autre. C’est cette posture de dignité, qui dicte son comportement ainsi que ses agissements ! D’autant que, la matière considérée est délicate. Nous voulons saluer la médiation du président Faure Eyadema du Togo et de Macky Sall du Sénégal. Leurs efforts fraternels de conciliation et d’apaisement prônés, ont été salutaires et ont fait honneur à l’Afrique. C’est un bel exemple à promouvoir pour l’avenir. La suite on la connaît avec Emballo et la CEDEAO etc. A contrario, l’initiative peu amène de notre sœur Pulchérie Gbalet (bien que cela soit dans la tradition ivoirienne), n’a pas moins été à l’emporte-pièce et contraire aux usages diplomatiques consacrés en la matière. On ne va pas disserter sur l’abécédaire ès qualité. Il faut noter qu’elle a péché comme une néophyte, plus par ignorance que, sans doute, par volonté de jouer dans une cour dont l’accès se fait par codes ainsi que par des valeurs de secrets qui fondent les us et coutumes de la diplomatie secrète.
Ce n’est donc pas une foire de société civile (?) ou de coterie politique. Elle ne pouvait être une interlocutrice sur un sujet d’Etat qui la dépasse ! Hélas, elle semble s’être méprise sur cette réalité, la forme et le fond d’une matière par trop sensible : les questions militaires. Lorsque l’on observe les ballets diplomatiques des experts et autres spécialistes des questions stratégiques et militaires, on se pose la question de savoir, qu’est-ce qu’elle est allée y chercher. Pour quoi y faire, et quoi y espérer ? Et pourtant, à son retour de Bamako, l’épisode de la garde-à-vue puis de son passage devant les autorités judiciaires avant sa remise en liberté, aurait dû lui avoir servi de leçon. De choses à ne pas faire en pareilles circonstances. La société civile (?) (qui est loin d’être neutre en Afrique), n’est pas un passe-droit.
Pas plus que sous son couvert factice et fictif, voudrait-on l’utiliser comme viatique pour accéder à certains cercles qui, pourtant ; ont leurs codes d’honneur et mots de passe. L’Etat a autant d’hommes que de rouages de spécialités. De personnes ressources ès qualité, ainsi qu’une kyrielle de missi-dominici en interne, pour ne pas être en mesure d’apprécier déjà, quelle était la nature du problème posé qui, lui ; ne relève en définitive, que de la raison d’Etat. Personnellement, j’aurais été d’un bon conseil si, un seul instant ; j’avais subodoré ou senti d’une part, qu’elle s’en irait à Bamako sur les bords du fleuve Djoliba et, d’autre part, plutôt que d’avoir retenu la leçon, elle se répandrait sur un sujet d’Etat par trop sensible sur les réseaux sociaux. Pour la circonstance, la réaction d’autorité de quelque pays que ce soit, intervient toujours ipso facto. Il n’est donc pas surprenant que, les autorités aient réagi pour faire la leçon.
« Les va-t-en-guerre en ont pour leurs frais ! »
Il faut espérer la mansuétude du Président de la République à son égard. Un citoyen quel qu’il soit, s’il n’en est mandaté, ne peut s’immiscer dans des affaires aussi sensibles que délicates comme celles de militaires. On n’a pas besoin d’un croquis pour le faire comprendre. Cela paraît si limpide. Pour tout dire, Ouattara connaît ses compatriotes que nous sommes. Il sait que les Ivoiriens n’ont jamais été aussi unis et solidaires qu’en la circonstance. Pour la grandeur de la patrie. Pas un mot qui contrevienne ou qui ne serait pas à sa place. D’où la prudence qui doit habiter les uns et les autres sur cette question, qui n’est pas ; un air qui incline à danser le tango ou la valse. Du reste, en maintes occasions, le Président Alassane Ouattara a su faire montre de son sens élevé de la négociation et du dialogue autant que de besoin, à l’exemple du père Houphouët. Il en a pris de la graine… C’est un homme d’honneur qui a le sens du devoir et du patriotisme. Rien de ce qu’il entreprend n’est le fruit du hasard. C’est un homme sage ! Le pouvoir d’Etat l’en a conforté. En l’espèce, à l’instar des sages comme lui, rien n’est fait dans la précipitation. Pas un mot de plus qu’il n’en faut. Ou, une attitude de plus qui ne se justifierait.
Pour les Latins ’’Cautus esto mater salutis’’ c’est-à-dire ‘’La prudence est mère de sûreté’’. Qui va piano va sano : « il vaut mieux partir lentement et atteindre son but, plutôt que de se précipiter et prendre le risque d’aller tout droit à l’échec ». Tôt ou tard, la fraternité triomphera ! Avais-je affirmé avec force conviction, dans cet éditorial, que la fraternité au-delà des tribulations politico-judiciaires, et autres dénis du droit sacré débarrassé des connotations qui en oblitéraient l’essence, triompherait. Grace à Dieu, il en est ainsi depuis le vendredi saint du 6 janvier 2023. Alléluia, gloire à Dieu qui est aux cieux et paix sur terre aux hommes qu’il aime. La fraternité a donc fini par triompher, comme nous le prédîmes. Les va-t-en-guerre qui souhaitaient ou vaticinaient l’apocalypse dans un déluge de représailles entre la Côte d’Ivoire et le Mali en ont pour leurs frais ! La sagesse du Président Alassane Ouattara a triomphé !
Bamba Alex Souleymane
Journaliste professionnel
Expert consultant en Stratégies, En Hautes Etudes Internationales et des civilisations
Chevalier de l’Ordre national (2006)
Officier de l’Ordre du mérite ivoirien (2001)
Commandeur dans l’ordre sportif (2010)