Le recrutement au secrétariat exécutif du PDCI RDA par Henri Konan Bédié, de l’ancien ambassadeur de Côte d’Ivoire à l’Onu Youssouf BAMBA, tranche avec les activités de Guillaume Soro qui multiplie les visites aux personnalités politiques du pays. Pendant ce temps, en face, le président Alassane Ouattara crée des unités dans l’armée, achète des armes et ouvre l’accès au pays à des bataillons d’armées étrangères. Dans un environnement qui présente des signes évidents d’hostilités, le FPI reste inaudible. Que nous préparent les hommes politiques ivoiriens ? Nelson Zimin décrypte.
Henri Konan Bédié, Soro, Ouattara, qu’est ce qu’ils nous préparent ?
Mon cher Kabako,
Ta tante m’a appelé ce matin et n’arrêtait pas de se plaindre. Devine de quoi ? Du refus de Laurent Gbagbo de voir son épouse Simone Gbagbo assumer l’intérim du FPI. « Ils veulent tuer la pauvre femme ou quoi » ? s’est-elle indignée. Je lui ai répondu qu’ils risquaient de lui rendre un grand service politique au contraire. Comment cela se pourrait ? C’est pourtant simple ; il faut avoir un prétexte ou une raison forte pour se révolter. Soit on devient rebelle au sein de son parti, soit on crée une nouvelle tendance ou courant. C’est comme ils veulent bien l’appeler. Elle va créer son courant et je te l’expliquerai une autre fois. Mais s’Il est vrai que Laurent GBAGBO ne veuille plus de Simone, ne trouves-tu pas anormal qu’il ne veuille plus d’elle au sein de l’héritage politique commun non plus ? Bon, c’est une affaire d’amour, une histoire privée qui ne m’intéresse pas. Mais qui réduit à Henri Konan Bédié son stresse.
Henri Konan Bédié, fin tacticien en eaux troubles
Dis-moi frère, avez-vous donné de l’eau à vos nouveaux étrangers ? Pour le PDCI RDA, ce ne sera pas compliqué, car il s’agit d’une seule personne.
Le président Henri Konan Bédié vient de nommer un ambassadeur à un haut poste de son parti. SEM Youssouf Bamba, désormais en charge des relations extérieures du parti. Heureux d’avoir rejoint le PDCI, le nouveau militant VIP n’a pas caché sa joie de rejoindre ou revenir au vieux parti qu’il connait très bien. « C’est avec beaucoup de fierté que j’ai participé à ma première réunion, la 126ème session du secrétariat exécutif. J’éprouve beaucoup de joie, de fierté de mettre mon expérience au service du pays, du parti auquel j’appartiens et au renforcement de la démocratie dans notre pays ». L’ambassadeur est venu préparer la démocratie. Bienvenu dans le chaudron du non-droit, excellence !
Tu sais Kabako, l’homme apprend de ses expériences et le PDCI RDA l’a très bien compris. L’affaire Ehouo Jacques a été l’un des éléments qui ont consolidé ce choix. C’est par la pression des chancelleries qu’ Henri Konan Bédié avait fait reculer le pouvoir, dans sa volonté de brigandage des urnes et la falsification des résultats du Plateau avant de se réfugier dans une laconique application du droit en sa faveur. L’autre fait historique majeur est la chute de Laurent Gbagbo. À sa prise de pouvoir, l’homme ne disposait pas d’un réseau fourni de diplomates de carrière. Laurent Gbagbo avait fini par nommer certains proches qui n’étaient pas du sérail diplomatique. Son isolement avant sa chute avait été facile. Tu vois, au PDCI RDA, Henri Konan Bédié a l’art de placer les pions. Pendant ce temps, Guillaume fait la cour.
Après Henri Konan Bédié, Guillaume cherche encore l’adhésion des membres de l’opposition
En bon opportuniste, Guillaume semble faire de sa victimisation, bon commerce. Après une tournée dans le nord et le centre du pays aux allures de visites d’État, Soro continue de sonner aux portillons des membres de l’opposition ivoirienne. Après Henri Konan Bédié, il y’a eu Charles Konan Banny, Affi N’Guessan, et les responsables du Parti Ivoirien des Travailleurs (PIT). Ainsi, suite à l’annonce d’une autre tournée nationale, (précampagne) pour la réconciliation, Soro avance déterminé dans les canevas de sa stratégie. Celui qui ne s’empêche pas de lancer des piques au camp Ouattara, capitalise à fond son rapprochement d’avec Henri Konan Bédié. Le « président commercial » du comité politique n’arrête pas de faire la cour à tout le monde et de se vendre comme l’unique alternative à une paix durable dans le pays. Statut qu’ Henri Konan Bédié et tous les autres revendiquent. Cependant, pensent-ils aux mêmes moyens pour arriver au pouvoir ou s’y maintenir en vue de garantir la paix aux Ivoiriens déjà traumatisés ? Pas sûr !
Ouattara pas très serein s’arme, après la rupture d’alliance avec Henri Konan Bédié et Soro Guillaume
Qui succèdera à Alassane Ouattara ? Une question à laquelle le chef de l’État semble ne pas avoir de réponse. Tu sais mon frère, ton grand père que je viens de joindre m’a donné un magnifique proverbe qui résume la situation de l’ex « bravetchè », devenu « problèmestchè ». Il m’a dit : « si un vieillard décidait de s’arrêter sur une calebasse, il sera confronté à la honte ». Si elle se casse, on lui en voudrait pour avoir détruit un bien. Mais si elle ne se casse pas, on le traiterait de poids plume.
Toute la problématique est là. Après le départ d’ Henri Konan Bédié du RHDP version ancienne, Ouattara est confronté à sa propre force. Que vaut-il réellement en termes d’électorat dans le pays ? Pas énormément, vu les résultats des élections municipales d’octobre 2018. Alors tu comprends que s’il est contraint de se présenter, il tient à s’assurer d’une victoire certaine, avec un Guillaume Soro dont l’armement et les hommes restent encore considérables, et en alliance avec Henri Konan Bédié. D’où la course à l’armement et le rappel des troupes françaises par Ouattara.
Ce n’est un secret pour personne que la garde républicaine ivoirienne a reçu 500 militaires du RSP burkinabé, dès la prise de pouvoir de Ouattara. Ceux-ci sont commis à sa sécurité rapprochée. La création d’une nouvelle unité spéciale au sein de l’armée et sous le commandement de son frère cadet Birahima Téné Ouattara, même si démentie par la hiérarchie militaire, justifie l’acquisition de nouveaux matériels militaires. Ensuite il y’a le débarquement de 500 soldats français à Abidjan, après la présence d’un navire de guerre signalé dans les eaux ivoiriennes courant février 2019.
L’on est tenté de se demander ce que les présidents Ouattara et Emmanuel Macron veulent bien défendre ? Une chose est certaine, Ouattara n’a jamais perdu de vue les conditions dans lesquelles il est arrivé au pouvoir. Alors face aux coalitions que mettent en place ses alliés d’hier, Ouattara ne veut rien risquer, si ce n’est de défendre de gros intérêts privés en créant l’équilibre des forces en présence. En attendant, «Quand le peuple sera intelligent, alors seulement le peuple sera souverain.»
Victor Hugo a dit. Le peuple peut donc repasser une autre fois pour son bien-être.
À bientôt
Nelson Zimin